Tout commence par une explosion, un hurlement : The Phantom chante Love Me.



Tempo trop speedé, break et reverb infernale sur la voix seule qui souffle "Love Me". Forcément, à l'époque on ne risquait pas de faire carrière avec un comportement pareil. Ce pauvre garçon a fini paralysé dans un accident de voiture. Encore une influence vocale majeure de l'ami Lux pour lancer ce disque.

Et surtout il y a Hasil Adkins, la révélation majeure de ce disque. Ce type est un grand malade et tout ce qu'il a fait est simplement grandiose.



Homme-orchestre (parce qu'il avait cru en écoutant la radio que Hank Williams faisait tout tout seul, et non pas après avoir vu Rémy Bricka en concert !), il a aussi inventé une façon unique de chanter, avec que des cris / slogans qui valent bien A wop bop a luba. Pour She Said, c'est Who ! He ! Ha ! Ha !
Et ça mime le souffle court pré-orgasme, et ça siffle, et ça envoie des She said : ohh... it feeeelz zo good aigus, tout ça avec une banane du diable.
Jamais entendu une telle liberté gravée sur microsillons.
En plus, miracle, Deezer ne le néglige pas. Tout ce qui est là ( http://www.deezer.com/#music/artist/3010 ) mérite de tourner entre vos deux oreilles à chaque fois que vous branchez votre ordi.

Egalement, un coup habile : qui aime les Cramps aime le Gun Club, et bien qu'il faille admettre que les Cramps ne l'ont jamais jouée, on trouve l'original de Fire Of Love par Jody Reynolds. Un enchantement pour tout fan du Gun Club qui se respecte.



C'est très pur, d'ailleurs ce garçon est déjà sur le versant mièvre du rock'n'roll. Avantage : on comprend enfin les paroles. Heureusement qu'un peu trop de reverb sur le riff de guitare entraîne cette version vers le côté obscur.

Sinon, grâce aux notes de pochettes, toujours très fournies (et signées sous pseudo Vip Vop & Mantra Ray par Lux et Ivy !),



on apprend que c'est au rockabilly classique (mais agrémenté de paroles suggestives) Rocket in My Pocket de Jimmy Lloyd que l'on doit I ain't nothing but a gorehound. Ah oui : les guitares ont même repris le riff de piano.




On s'aperçoit aussi q'une bonne part des influences des Cramps sont bubblegum 60's (un peu tordu quand même) : Paul Revere & the Raiders, Kasenetz / Katz Super Circus, ces derniers avec un Quick Joey Small très entraînant. Finalement, on prend des chansons rockabilly, on écoute la dérive jusqu'aux sons du garage 60's, on pervertit encore le son en extrapolant 20 ans de plus, on ajoute un peu de la démence de quelques grands oubliés, et on obtient les Cramps.

Lux a déclaré dans une interview que pour lui, Charlie Feathers est le meilleur chanteur de tous les temps. C'est sûr qu'il a le hoquet gracile sur I can't hardly stand it, mais c'est quand même pas Elvis...



Tornado, de Dale Hawkins, permet d'entendre la guitare de James Burton, l'homme qui a inventé le riff de Susie Q et a accompagné Elvis de 1969 à 1977. L'autre guitariste d'Elvis.

Premier black sur les compilations Born Bad (il y en aura d'autres) : Little Willie John. Un de ceux qui ont revendiqué la paternité de Fever. Et son interprétation est somptueuse.

Il y a un autre Cochran, Jackie Lee, et il est aussi venu, avec son gentiment décadent Georgia Lee Brown. Les choeurs font Ba Ba Dum, Ba Ba Dum, Ah Ooooooo dans les graves. Et puis on s'enfonce dans l'exotica avec les bongos de Dave 'Diddle' Day, qui sait par ailleurs chanter "Baby" avec le hoquet là où il faut. Y a quand même de la tenue !

Ricky Nelson, qui clôt le disque, craint. Showbizz, trop mièvre, trop mou, trop beau (et con à la fois ?).
Mais pas Lonesome Town, jolie chansonnette sur une mélodie enchanteresse comme les Cramps ont su en ramener du fond des âges (autre exemple : Green Door). Pas délayée, pas le temps de devenir ennuyeuse. Un court moment de bonheur.

Enfin, en bonus à la fin des notes de pochettes, il y a le Top Ten de Lux et celui d'Ivy. C'est à 80% strictement introuvable. Pour ne pas démoraliser les collectionneurs, il est intentionnellement illisible.