Une pochette attirante, avec son sticker en guise de pastiche du titre de leur premier album :



La pochette intérieure est riche de photos et renseignements précieux. Qui racontent les petites histoires de ces fous originels, oubliés des majors et de la Grande Histoire du rok'n'roll. A cette époque, on n'avait pas internet pour trouver tout plein de liens Link Wray ou Mel Robbins.



Notes de pochettes qui racontent aussi de jolies Petites Histoire de Songwriting© : mélangez le riff du Fat Back de Link Wray avec les paroles de Sunglasses After Dark, un rockabilly de Dwight Pullen. Vous obtenez le Sunglasses After Dark des Cramps.



Bon, revenons à notre galette :



Il y a pas mal de crédits qui tuent, aussi : notes de pochette par "Criminal Dave", pochette par "Autist Inc.", "A labour of Lust Production for Born Bad Records". Bon esprit, non ?

Le disque commence avec un vieux teaser pour un film de Russ Meyer et la version original de Faster Pussycat que l'on connaissait depuis Smell Of Female. Mélodie terrible, son gentiment dérangé avec les Go ! Go ! d'un allumé en surimpression.



Et puis le riff de Goo Goo Muck joué par des cuivres basses. Par les fameux (?) Ronnie Cook & the Gaylads. Et ben ça change de la double attaque de saturations de Poison Ivy et de Kid Congo.

Evidemment, c'est plein de rockabilly relativement straight et obscur, Dwight Pullen, Glen Glenn, Ronnie Dawson, Warren Smith. Mais sans ostracisme : on a le doit d'être connu, comme Roy Orbison. Il est venu avec son Domino, repris par les Cramps dès Gravest Hits.

Pas d'ostracisme, non : y a aussi du garage 60's. Par exemple les excellents The Third Bardo avec une chanson charpentée par une basse à la fois sourde et mélodique, assistée par une guitare en arpèges avec un gentil effet trémolo. Et il y un solo fuzz bien saturé dans les aigus.



Et puis il y a les chocs.

D'abord les furieux des furieux, les Sonics avec Strychnine. Un assaut inédit pour nos oreilles de l'époque, puis les ré-éditions ont suivi.

Ensuite, les Groupies pour leur fabuleux Primitive. Un son monstrueux avec une réverb pas possible sur la grosse caisse qui emmène toutes les basses et crée un genre de Wall Of Sound caverneux, un riff de lead aigu renforcé par un trémolo trop prononcé, et une voix de vilain petit canard comme on les aime. En plus, des "One Act Wonder" qui n'ont jamais enregistré que ça avant de disparaître.



Mel Robbins envoie Save It comme un rockabilliy piano de base, sauf qu'il y a son genre de ricanement malade en ouverture, des ahanements pré-Lux Interior, et une grosse pêche dans la voix. C'est pas Jerry Lee Lewis, c'est son lointain cousin vicieux.

Et autre voix venue d'ailleurs (un certain Bob Nolan) avec The Novas : un hurlement, des grognements d'ours, des éructations, sur un joli bruit de fond. Tout ça pour un hommage au catcheur (!) The Crusher. Influence vocale importante de l'ami Lux, donc.



Le tout dans un bel esprit de liberté : c'est sensé être des chansons reprises par les Cramps, et on termine avec Wanda Jackson dont ils n'ont jamais rien joué. Parce que c'est une femme comme Ivy et que les Cramps l'aiment beaucoup.



Et voilà : grâce à ce disque, on s'était remis à l'oreille l'amour du son originel, l'envie de retrouver cette énergie et cette insouciance primitive et joyeuse. On était repartis pour de nouvelles aires à découvrir dans l'histoire cachée du rock'n'roll, et pour se jeter sur tout ce qu'on trouverait dans la même veine. Ce qui tombait bien puisqu'il y aurait bientôt un Volume Two.