C'est quoi ce bô dessin ? Une gravure de Jean Rivier, compositeur français du XXème siècle, extraite de son livre A pas d'enclume. Au verso, il y a aussi une citation dudit. C'est pas parce qu'on fait du rock qu'on est des incultes.

Au verso, surtout, quelques photos en action au Chalet où fut enregistrée la chose :


Un insert encore, une belle habitude chez Boom Rang Records qui a aussi produit ce disque, en 1988 (distribué cette fois par GMG). Les paroles des chansons et les photos des musiciens :



Et cette manie de ne pas indiquer clairement 1 et 2 (ou A et B) sur les étiquettes. Grrrr... Mais j'm'en fous : sur une face y a 4 chansons et sur l'autre seulement 3, alors c'est facile de pas se gourer.



Bon, autant le dire tout de suite, le disque ne rend pas complètement compte de ce que pouvait être Unknown Pleasures sur scène. Ils ont dû passer trop de temps sur les arrangements et le son est très clair. Ouais, ouais, je suis qu'un c... de rockeux qui aime les décibels, le boum boum et les larsens.

Leur son sur scène était tiré par les deux bruyants à la batterie et à la lead guitar. Là, on les entend moins, il y a aussi de la guitare sèche, beaucoup de claviers... Les constructions des chansons sont plus complexes, ou bien on entend mieux leur construction au lieu du déluge sonore des concerts. Et puis on entend de la réverb sur la voix mixée un peu trop devant. Mais ça a dû lui faire tellement plaisir de s'entendre chanter, à Bernard.

Bernard qui écrivait les paroles et les chantait en anglais, l'instit' du rock (du fait de son honorable profession, le rock ne fait pas souvent vivre son homme en province). Un peu comme à la même époque Laurent Fignon était l'intello du peloton. Les mêmes lunettes, en plus... Probablement responsable de la légère fixette Joy Division du groupe :
- déjà, leur nom Unknown Pleasures ;
- et puis la chanson No Solution dans laquelle il répète "No solution... Isolation / No solution... Isolation". Humm, ça fait drôle ;
- et aussi dans sa façon de parler / chanter dans les graves un peu Ian Curtis, en un peu plus fort et voix moins grave / sèche.
Mais il montait aussi vers les braillements amples plus aigus, un peu Bono (pour le résultat). En gros, la fameuse tension entre passages calmes et énervés devenu poncif depuis Nirvana (mais en 88, ils ne pouvaient pas savoir), et qu'on retrouve souvent dans la construction des chansons.

La batterie, c'était Nénesse (dit "Jean-Michel" sur la pochette), le Keith Moon de Montlouis s/ Loire. Faut lui rendre cette justice qu'il tenait plus du premier que des seconds. Je ne l'ai jamais vu calmé. Un cogneur, puissance brute, et un emporté aussi. Une fois parti, disons aux deux tiers de la première chanson, il faisait un peu tous les morceaux en roulements perpétuels. Même que ça énervait un peu les autres, des fois.

Frank tenait la lead guitar : l'homme qui s'était construit une telecaster en metal. Et un son au delà de toute définition avec une saturation très métallique (forcément), des effets de ouf, du beau bruit quoi. Côté style, il assurait les rythmiques en accords saturés et glissés, un peu comme s'il avait eu un bottleneck, mais rien qu'avec les doigts et le son. Sur les solos, un grand barré : comme si Syd Barrett (pour la base très rock'n'roll, aussi) avait joué avec le son de Hendrix en plus métallique.

Et Jean-Hervé : look d'étudiant propret, mais un putain de bassiste. Pas le genre qui virtuose pour rien, mais plutôt qui booste les montées à grand coup bien profonds. Plus quelques capacités multi-instrumentistes (la guitare accoustique, les claviers), un peu brimées sur scène faut bien dire. Lui aussi, il s'est fait plaisir en enregistrant ce disque.

Un drôle de conglomérat, ceux-là. On se demande d'ailleurs comment ils se sont trouvés. Mais un vrai groupe soudé au final, et leurs prestations étaient autant de montées magiques donnant souvent une impression de jams monstrueuses.

Sur le disque, quelques chansons s'en sortent bien quand même, et conservent le groove qui était leur règle générale et image de marque.

- No Place, qui ouvre le disque. Celle-là était in-ratable, tellement elle est bien écrite. Même si côté paroles, ça ne rigole pas tous les jours : "No, no place for me... in the land" ;
- Dream Lover, celle qui conserve le plus ce groove up-tempo sans être frénétique, porté par les vrombissements de basse et les délires des deux malades.
- Your Smiling Face, le tube du disque. En tous cas, "elle a tout d'une grande"... chanson pop : "Holding your photograph / Your Smiling Face / Oh Kate / O.K".

Et puis il y a Cabaret, une histoire bizarre qui parle de Cats & Mice (le pluriel de Mouse, bande d'ignares) sur une musique un peu bizarre : deux séquences rythmiques et mélodiques très différentes collées et alternées en couplets / refrains.

Mais The Train, pourtant un de leurs chevaux de bataille sur scène, ne s'en relève pas. Un massacre comparé à ce qu'elle pouvait être, qui comme White Flower, vaut finalement plus pour les souvenirs qu'elle ramène à la mémoire que pour son rendu réel sur le disque.

Voilà. Unknown Pleasures a fait un second LP en 1990, où figure apparemment leur reprise héroïque de Waiting for the Man, toujours chez Boom Rang (pochette ici : http://euthanasie.records.free.fr/discographie/P01index.htm , suivre le lien LABELS et aller voir les "Boomrang"). Mais celui-là, je ne l'ai jamais entendu.