Label : Pucci records
Référence : 001
Année : 2006
Nombre d’exemplaires : 1000

Face a : La frite équatoriale (version inédite)
Face b : I want to suggest


Dans quel but avez-vous édité ce 45 tours ?

Je cherchais une manière de faire connaître le titre principal, et aussi un "objet" qui symboliserait et marquerait le lancement de l'association, au cours de l'événement Courcelle's Street au Divan du Monde de septembre 2006.
Géraldine et Olivier Chanu, deux amis aficionados du son "de Roubien", DJs et manageurs dans le monde de la musique, m'ont soufflé l'idée de le faire sous la forme d'un 45T collector.
Nous l'avons édité pour inscrire dans le temps l'année du trentième "anniversaire" de la disparition de mon père, et aussi afin de répondre à la demande de certains DJs qui passent régulièrement les vinyles et/ou s'en inspirent pour les "remixer" avec talent, tels que les Troublemakers et Nicolas Errera par exemple.
Je crois beaucoup au "remix" lorsqu'il est fait par des compositeurs qui savent, tout en respectant l'auteur d'origine, apporter leur propre univers… En créant ainsi un troisième "style".
C'est à la fois un hommage et une rencontre artistique, que mon père aurait (je crois) certainement appréciés et soutenus !

On peut noter l'originalité de ce titre qu'a composé ton papa "La Frite Equatoriale". Pourquoi avoir choisi de le mettre en avant plutôt qu'un autre ? Quelle est l'histoire de ce morceau ?

"La frite équatoriale" est une phrase que Jean Pierre Pellissier (le principal ingénieur du son et complice) a trouvé dans des cahiers que mon père remplissait de dessins et de "pensées" éparses. C'était à la base, une maquette refusée, destinée à une séquence du film "Chut" de Jean Pierre Mocky, avec "polygamie" comme titre d'origine.
Cette maquette n'ayant jamais vu le jour, J.P. Pellissier et mon père l'ont gardée pour la compilation des "meilleures musiques de films" qu'ils projetaient de faire… Le titre, hors du contexte du film pour lequel il était destiné, s'est transformé en : "La frite équatoriale". C'est une composition que j'affectionne tout particulièrement, un de mes morceaux préférés, qui me rappelle une anecdote avec lui : le jour où il a reçu son premier synthé, il m'a demandé de venir dans le studio/salon de la maison, pour me faire écouter les sons incroyables qu'il découvrait.
Comme un gosse, il m'a fait la démonstration, en me demandant quel bruit je voulais qu'il me reproduise… Et la jungle est tout naturellement arrivée.
Mon père était tout excité, et je ne savais plus bien lequel de nous deux était le plus "gamin" à ce moment-là… Nous avons dansé tous les deux et fait les "singes" dans la pièce. C'était un très joli moment de complicité, entre un papa toujours prêt à assumer le petit garçon sans cesse curieux et enthousiaste qu'il était… Et sa fille joyeuse et pleine de vie, qu'il élevait. En outre, ce morceau étant composé sans électronique, il ne pouvait donc pas figurer dans le volume 2 du "Monde électronique" (1) et n'avait jamais été édité hors des 3 volumes Barclay (2)… !
Nous avions à notre disposition deux versions, celle parue chez Barclay et une deuxième enrichie d'un passage au piano et aux trombones. C'est principalement avec Gilles Loison qui m'a dégotté le deuxième enregistrement et Olivier Chanu qui a été amicalement et bénévolement le co-réalisateur de cet album, que nous avons fait le choix de la 2éme version… l'inédite ! Stéphane Lerouge nous a, bien sûr, donné un sérieux coup de pouce.

Peux-tu nous parler de la face B ?

Le choix de la face B m'est venu grâce à Georges Billecard, un des principaux amis de mon père, clarinettiste co-fondateur du groupe de jazz "New Orlean's Collège", qui a troqué sa clarinette pour devenir chanteur à l'occasion de "I want to suggest". Il m'a fait écouter chez lui, ce grand moment de rire entre Maurice Lecoeur à la basse, Michel Klotchkoff à l'orgue, lui au chant et François à la guitare électrique. C'était une impro pop assez "gaguesque" entre quatre potes qui cherchaient à reproduire le son de leur époque, typiquement seventies. Ce qui collait parfaitement avec cette fête de l'amitié que nous organisions autour de la mémoire de François.

Pourquoi avoir choisi le format vinyle finalement ?

Nous avons choisi ce format puisqu'il répondait totalement à la rétrospective des années 70… et qu'il répondait aussi à la demande des DJ qui remettent au goût du jour ces années-là !

Le design est assez réussi. De qui se composent les éditions Pucci ? (Pucci étant le surnom en corse de ton papa lorsqu'il était petit, j'imagine une équipe plutôt "familiale" ?)

Les 3 trois graphistes bénévoles de l'association, Gilles Loison, Alex Mas et Yves Tallandier étant déjà bien sollicités et occupés sur le projet de "Courcelle's Street". Pour le design du 45T j'ai choisi de faire appel à Fabien Segnobos, un graphiste d'Arles de mes amis, dont j'adore aussi le travail. N'étant pas un fan assidu de la musique de mon père, (qu'il découvre tranquillement), l'idée de se décoller un peu de l'imposante image de mon père, m'a paru intéressante.
Sachant Fabien amateur du film de Serge Korber "L'homme orchestre" et ayant moi-même la volonté de faire de cette pochette un symbole des années 70 réactualisé… Je lui ai montré la jaquette du DVD en lui imposant comme seule charte de s'en inspirer. Immédiatement l'idée de reprendre les robes "vinyles"des danseuses figurants sur la photo lui est venue et il m'a proposé l'idée de monter une collection, avec les autres disques que nous avons pour projet d'éditer ultérieurement, en gardant le design de la pochette et en ne changeant que la couleur du macaron suivant les différents 45T et/ou 33T à venir. Concernant les éditions "PUCCI records", c'est naturellement que j'ai eu envie de donner ce nom, ce surnom que "la Nona", la grand-mère italienne de mon père lui avait donné, et qui reste en Corse le surnom de mon père.
J'ai également repris ce nom de "PUCCI production", pour le court-métrage "francoisderoubaix.fan" que je viens de réaliser, dont le sujet principal est… François de Roubaix ! "Pucci" voulant dire : "le petit"… Ce sont deux "départements" : l'édition et la production", que nous commençons modestement à développer au sein de l'association, au gré des projets qui se présentent, pour faire connaître le patrimoine que François nous a laissé en héritage, et que nous tentons aussi de restaurer. Pour faire vivre cette association, j'espère que notre très modeste production musicale et audio visuelle, pourra un jour générer suffisamment d'argent pour qu'elle puisse développer le secteur mécène que nous avons commencé à mettre en place avec le "prix coup de pouce" et pouvoir enfin dégager des rétributions financières à tous ceux qui nous aident bénévolement depuis le début !
La restauration du patrimoine nécessite aussi des fonds… qui sont bien difficiles à obtenir

Il y aura donc d'autres projets pour Pucci records. En vinyle ?

Oui, nous aimerions beaucoup continuer d'éditer des vinyles et de, peut être, produire des films. Pour l'instant les fonds nous manquent toujours… Mais nous y travaillons !?Nous avons plusieurs projets à l'étude, notamment le "prix coup de pouce" que je ne voudrais absolument pas arrêter.
Nous pensons aussi, toujours avec Olivier Chanu, faire quelque chose au Japon, où la musique de François est assez appréciée.

De plus en plus de personnes rachètent des vinyles aujourd'hui. Que penses-tu de ce retour à "la galette" ?

Il y a "l'objet" ! "Quand on est collectionneur, on veut toucher l'objet"…
Cette phrase est délicieusement mise en bouche par Alain Decharte, un des "fans" que j'ai interviewé pour mon court-métrage "francoisderoubaix.fan" (qui sortira en bonus du DVD de la version restaurée du Film de Robert Enrico "les Aventuriers" courant mai 2007). Il y a l'aspect collectionneur d'une part bien sûr, mais je crois aussi que outre le fait que le "son craquant" rétro et irremplaçable que la galette nous offre, nous nous trouvons, avec ce début du 21ème siècle, à un carrefour où nous réintégrons le passé pour aller vers le futur ! Nous avons, pour avancer si vite dans le XXe siècle, dû "renier" et balayer le passé… Aujourd'hui, je pense qu'il nous est nécessaire de replonger dans nos racines pour trouver un point d'équilibre plus serein. Ce qui se passe avec le bio, la mode, la déco…etc en est l'exemple type. Nous avons besoin de connaître, accepter, cultiver et protéger d'où nous venons, pour aller de l'avant, pleins et entiers… Je ne crois pas que ce soit simplement un "passéisme" désuet ou nostalgique… Je crois que c'est plutôt une réalité que nous réintégrons : "c'est avec les vieux pots qu'on fait les meilleures confitures". Dans la musique, le "remix" en est l'exemple type. Le grand Serge Gainsbourg l'avait bien compris, lui qui faisait, avec génie, de nouvelles compositions très "actuelles" avec certaines grandes musiques classiques !

Possèdes-tu des vinyles ? Te souviens-tu du dernier que tu aies acheté ?

Oui, j'ai quelques vinyles que je garde religieusement. J'en achète assez rarement, je n’ai pas encore le réflexe, ni l'installation adéquate (mais j'y travaille !). Les derniers que j'ai achetés, ce sont ceux qui concernent mon père, car je tente de reconstituer une collection pour le fond "patrimonique" de l'association. Grâce à Ebay et à quelques fans qui m'épaulent sérieusement, je trouve dans le monde entier des éditions de ses musiques de film.

Pour toi qu'évoque un vinyle ? Y-a-t-il une différence lorsque tu écoutes un 33 tours de ton père par rapport à un CD ?

Bien sûr, il y a une différence fondamentale : les 45T ou 33T de l'époque (hormis les 3 volumes Barclay que Jean Pierre Pellissier à réalisé), ces autres vinyles donc, correspondent tous à des films bien particuliers. Sur la pochette, le film pour lequel la musique a été composée, est mis en avant. Les disques étant mis en vente au moment de la sortie en salle du film, ont une empreinte graphique très marquée par l'époque. En faisant l'acte de sortir la galette de sa pochette illustrée, on est déjà plongé dans une atmosphère particulière rattachée soit aux souvenirs que l'on a du film, soit de l'idée que l'on s'en fait par le titre et la photo des acteurs principaux… En écoutant le disque, les craquements du vinyle me replongent dans un passé vécu ou non, suivant l'âge que j'avais au moment de la réalisation. Tandis que lorsque j'écoute les CD, c'est plus souvent mon père qui est mis en avant. Malgré certaines superbes re-sorties CD sur un film particulier, tels que "l'Homme Orchestre" ou "la Scoumoune", le graphisme et les moyens techniques ayant tellement évolués, le film et l'époque passent pour moi au second plan…. C'est surtout mon père que j'écoute.

On trouve assez difficilement les 33 tours de ton père. Est-ce que tu trouverais un intérêt à en faire rééditer sous cette forme ? Et lesquels en particulier ?

Si on devait en faire rééditer un seul sous sa forme d'origine, ce serait probablement "L'homme orchestre", car il reste le plus rare et le plus recherché par les DJ pour son empreinte si inscrite dans cette époque folle des années 70. Mais je pense que le plus judicieux serait d'en éditer de nouveaux, rassemblant des titres connus et d'autres plus difficiles à trouver. Ce serait aussi intéressant, je crois, de se décoller des films, et de faire apparaître le compositeur qui peut s'écouter indépendamment… C'est en tout cas, la demande que je rencontre auprès d'aficionados et/ou de Djs compositeurs !

Je suis reconnaissante à Stéphane Lerouge, Bertrand Liechti (Sido music), Daniel Richard (Universal Jazz), Danielle Feuillera (F. Dreyfus édition) pour le formidable travail qu'ils font autour des musiques de mon père.
Je dois aussi rendre hommage aux éditeurs, qui nous aident et nous soutiennent vraiment ! Dans ces temps où le marketing est le maître absolu et où les éditeurs n'ont pas franchement bonne presse, force m'est de constater que beaucoup de ceux qui détiennent les droits des musiques de François, sont de précieux alliés, qui font un travail remarquable… sur un compositeur disparu depuis plus de trente ans, et qui n'est pas aussi "bankable" qu'un C. Trenet ou qu'un Elvis Presley !!!
C'est grâce à eux qu'un : "Prix coup de pouce" peut voir le jour, et ainsi donner sa chance à de jeunes talents !!!
Nous avons charge, en préservant un patrimoine, de transmettre cet héritage aux générations futures. C'est cette nouvelle génération qui fait que le passé reste vivant, en le faisant (re-)découvrir aux autres et en l'aidant à se perpétuer dans le temps.
Mon père n'avait que peu de temps devant lui pour produire tout ce qu'il nous a laissé en héritage…
Aujourd'hui, grâce à vous tous… Il reste présent.

Merci,

Patricia de Roubaix




(1) Le Monde Electronique de François De Roubaix Vol II (2006 - Emarcy 981 808-9 - Distribution Universal)
(2) Les plus belles musiques de François de Roubaix :
• Volume 1 – LP - Barclay records 900502 (1976)
• Volume 2 – LP - Barclay records 900527 (1977)
• Volume 3 – LP - Barclay records 900577 (1979)


Quelques liens :

http://www.francoisderoubaix.com
http://deroubaix.free.fr/
http://emma.esse.free.fr/francoisderoubaix/
L’excellente collection « Ecoutez le Cinéma » chez Universal