Ahmet Ertegun est mort le 14 décembre à l'âge de 83 ans. Le désir de nombre d'artistes est de mourir sur scène. Signe du destin ? ce grand monsieur de l'ombre a succombé aux séquelles d'une chute dans les coulisses d'un concert des Rolling Stones un mois et demi auparavant !
C'est en 1947 qu'Ahmet Ertegun, fils de diplomate turc, avait fondé un petit label avec son ami Herb Abramson, comme lui passionné de blues et de jazz. Sans le sou, ils avaient convaincu le dentiste d'Ahmet de la famille de leur faire un emprunt de 10 000 dollars. Et le rêve américain se réalisera puisque les deux inconscients, non contents de s'attaquer aux trois majors qu'étaient alors RCA, Columbia et Decca, réussirent leur pari ! Atlantic a traversé les années (c'est aujourd'hui une filiale de Warner Music) et a produit et distribué les plus grands artistes. Si les 25 000 € qu'Atlantic offrit à Elvis ne suffirent pas en 1955 pour le signer (c'est RCA qui décrochera le jackpot), de nombreux talents furent découverts par Ahmet qui donna leur chance à de jeunes artistes noirs, ce qui n'était pas franchement le cas partout à cette époque. Ray Charles, Aretha Franklin, Otis Redding, Percy Sledge, Sam & Dave, Wilson Pickett, Booker T. and The M.G's ont, par exemple, été produits par Atlantic à un moment ou un autre de leur carrière (notamment via le sous label Atco). Au milieu des années 60, c'est un virage rock qui s'opère avec l'arrivée de Cream, Led Zeppelin, Buffalo Springfield, Crosby, Stills & Nash, Blind Faith, Vanilla Fudge, etc.
En 1967, Atlantic est vendue pour 20 millions de dollars à Warner mais Ahmet Ertegun gardera la main sur le label qu'il a fondé jusqu'au dernier jour (avec le titre de président fondateur). En 1971, ce sont les Rolling Stones qui sont signés, excusez du peu ! Et puis il y aura Yes, Genesis, AC/DC et, plus proche de nous, James Blunt ou Gnarls Barkley. Bref, vous l'aurez compris, quels que soient vos goûts musicaux (je n'ai pas parlé ici du jazz et du classique qui ont eu une bonne place au catalogue d'Atlantic) vous avez forcément eu sur votre platine une galette que vous avez adorée et écoutée jusqu'à l'usure. C'était à ce monsieur qu'il fallait dire merci. Et il n'est jamais trop tard pour dire merci. A l'image du site Internet d'Atlantic qui propose un petit espace dédié à son fondateur.