Bryan Galettophage


Inscrit le: 18 Juin 2007 Messages: 993 Localisation: Reims
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Posté le: Mer Avr 29, 2009 10:01 pm Sujet du message: HADOPI : LA CRÉATION SACRIFIÉE |
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Lors de la 1ère édition des rencontres profesionnelles du MaMa à Bourges, les 21 et 22 avril 2009, les labels indépendants membres de cd1d.com (fédération professionnelle nationale de plus de 100 labels) se sont réunis et ont élaboré un texte collectif afin de faire entendre leur position singulière, largement ignorée dans tous les débats qui animent le monde de la musique (Loi Hadopi, nouveaux modes de répartition, etc). Ainsi, au travers des différentes fédérations, régionales et nationales, que nous sommes (cd1d, FEPPIA, Phonopaca, Ferarock, Fedurock...), ces acteurs indépendants ont décidé de se faire entendre et dimaginer, ensemble, les collaborations susceptibles dimposer davantage les réalités et les urgences de nos structures, nos équipes et les artistes que nous soutenons.
On vous lavait bien dit... Lindépendance sorganise !
Nhésitez pas à diffuser cette information sur vos différents supports,
HADOPI : LA CRÉATION SACRIFIÉE
Par Philippe Couderc, président de la Feppia (Fédération des producteurs et éditeurs indépendants dAquitaine, 22 labels adhérents) et Eric Petrotto, président de CD1D, fédération nationale de labels indépendants 100 labels adhérents
http://www.cd1d.com
Lettre ouverte à Mesdames et Messieurs les députés,
Alors que la loi « Création et Internet » revient au Parlement, nous, producteurs indépendants de musique, voulons vous interpeller en apportant un éclairage radicalement différent de celui généralement promu par les grandes compagnies du disque.
Les producteurs indépendants de musique (communément aussi appelé labels indépendants) sont aujourdhui plus de 600 en France et cumulent plus de 3 000 productions par an. Ils sont très souvent de toutes petites structures (SARL, scoop, association) comportant de 0 à 5 salariés en moyenne. Pour paraphraser le Syndicat de lartisanat, ils sont aujourdhui la plus grande maison de disques de France, produisant 90% de création originale, soit généralement les première, seconde ou troisième ½uvres dartistes de tous horizons et de toutes esthétiques musicales. Très souvent hors des sentiers battus, ils représentent la véritable diversité culturelle que ce pays se flatte à raison de défendre. Sans eux, les Dominique A, Yann Tiersen, Ogres de Barback, High Tone... nauraient jamais débuté (la liste pouvant être longue). Aujourdhui, cette liberté de créer est menacée, car la majorité de ces structures indépendantes est au bord de lasphyxie.
Les labels indépendants sont partagés quant à cette loi. Pourquoi ? Parce quau fond, si elle rappelle le droit inaliénable des ayant droits à être rémunérés, elle en oublie la réalité vécue par des milliers dartistes et de producteurs, en même temps quelle pose de vraies questions sur les libertés individuelles. Pour les acteurs indépendants, les conditions de travail nont jamais été faciles et idéales, crise ou non. Mais la dévalorisation constante de la musique orchestrée par les majors a rendu ces conditions difficilement tenables aujourdhui. Dès 2006, la mort annoncée (pour 2010) du CD, par une presse nécoutant que les poids lourds de lindustrie musicale, a précipité cette chute du marché et conforté un large public dans la totale dévalorisation du support. Non seulement il nen est rien, mais encore aujourdhui, le physique représente près de 90% des ressources des producteurs indépendants. Mais dans un pays qui a laissé détruire son réseau traditionnel de disquaires au profit de chaînes omnipotentes, ces ressources traditionnelles chutent désormais, sans que le numérique vienne à les compenser. Et il y a, malheureusement, fort à parier quil nen sera jamais ainsi.
La politique de fuite en avant des majors a très largement contribué à la dévalorisation de la musique. Par un discours inique contre le public, désigné comme voleur potentiel avant dêtre amateur de musique, les majors ont radicalisé le phénomène, en développant en même temps une politique de prix cassé qui cherche à condamner le physique (moins rentable pour eux que le numérique). Après avoir bradé leur catalogue dans des offres parfois aberrantes (accès à lensemble dun catalogue à volonté pour le détenteur de telle carte bancaire par exemple), les majors adoubent des sites de streaming tel Deezer.
Deezer est non seulement une escroquerie, mais surtout le dernier degré de la dévalorisation de la musique.
Deezer a fondé son succès sur la gratuité totale découte de musique piratée. Il est paradoxal que les majors du disque aient depuis tant dannées vilipendé les internautes pour adouber une société commerciale qui aujourdhui encore propose du contenu piraté.
Deezer nest pas une radio. En effet, avec Deezer, vous choisissez découter ce que vous voulez, quand vous voulez, autant de fois que vous voulez, là où vous le souhaitez. Cest une discothèque à distance écoutable depuis nimporte quel ordinateur ou téléphone mobile (type i-Phone). Contrairement à une radio qui diffuse un programme choisie par ses soins.
La rémunération de Deezer aux producteurs est ridicule et inadmissible : 24 185 écoutes = 22,85 euros.
Mais surtout Deezer avalise auprès du public lidée que la valeur de la musique est égale à 0. Et cest peut-être cela le plus grave, car rien ne le justifie.
Si linternaute grâce à Deezer peut se construire gratuitement sa propre discothèque consultable à volonté, pourquoi dès lors achèterait-il de la musique sur les sites de téléchargement légaux ?
Enfin, on propage lidée que Deezer favorise la découverte par linternaute de nouveaux artistes. Il nen est rien dans la grande majorité des cas. Aujourdhui, les producteurs indépendants vendent toujours moins de disques et ne constatent pas une augmentation du public venant voir leurs artistes en concerts. Il y a bien dautres moyens de découvrir de la musique via par exemple les réseaux sociaux type Myspace.
Avec Deezer, les majors du disque abattent la valeur de la musique au profit dune rentabilité à court terme (combien Deezer a-til acheté sa « légalisation » par Universal ? Quel est la rémunération de Universal et quelle en est la répartition Universal / artiste Universal ? Les majors du disque construisent leur rentabilité de groupe puissant sur le dos des producteurs indépendants que nous sommes et dont ils font peu de cas.
A cela, nous devons remarquer quà aucun moment il nest fait état de la responsabilité lourde que portent les fournisseurs daccès à Internet (FAI) dans la situation actuelle. Les FAI ont construit leurs réseaux, communiqué dans leurs campagnes publicitaires et acquis leur clientèle grâce à un contenu musical qui ne leur appartenait pas. Car à quoi bon souscrire du haut débit pour recevoir de simples courriels ? De télévision on ne parlait pas il y a encore quelques mois de cela, cest donc bel et bien essentiellement la musique qui, avec le cinéma, a été le terreau du développement de linternet commercial. Ces fournisseurs daccès nont, à ce jour, jamais reversé le moindre centime à la musique. Au contraire, ce sont les chaînes de télévision publiques qui sont désormais en partie financées par une taxe versée par les FAI, par la grâce dune décision politique.
Le débat doit aujourdhui changer de nature et poser les vraies questions.
assigner en justice de façon systématique (et collective) les sites faisant commerce de nos contenus en toute illégalité,
créer une redevance prélevée sur le chiffre daffaires des FAI destinée à la création,
éliminer définitivement les problèmes dinteropérabilité matérielle et donner la libre utilisation des fichiers acquis légalement, dans la limite de son cercle damis,
interpeller la Sacem sur la nécessité dadapter son système de perception et de répartition aux nouveaux modèles technologiques,
favoriser lémergence de modèles économiques alternatifs aux grands conglomérats (quils se définissent comme des majors ou des indépendants),
réintroduire et développer le réseau de diffusion du disque physique, loin dêtre mort, avec les disquaires ainsi que dautres commerces de proximité tels les libraires, salles de concerts
lutter contre latrophie actuelle de loffre physique dans les chaînes de magasins ; le disque est un objet culturel, pas un baril de lessive,
intégrer plus largement les producteurs et labels indépendants dans toutes les discussions, réflexions et prise de décisions concernant la filière musique.
Il nexiste pas une solution miracle mais un ensemble dactions concrètes à mettre en place qui puisse tout à la fois permettre tant aux internautes, quaux artistes et producteurs de redonner sa véritable place à la musique et sa pleine dimension artistique. Il est grand temps de sy mettre, en laissant de côté ces combats stériles qui, on le voit bien, ne mènent décidément à rien. Car au rythme où vont les choses, il ny aura dans quelques années que les majors du disque pour produire la musique et quelques sites adoubés par elles pour la distribuer. Il en sera alors fini des artisans de la musique que nous sommes, défricheurs depuis toujours dune véritable diversité dans la création. Est-ce là le but recherché ?
De part lurgence de leur situation, les producteurs indépendants que nous représentons par nos signatures, sorganisent enfin pour faire reconnaître et entendre leurs problématiques et leur importance primordiale dans la création. Nous sommes aujourdhui prêts à prêter notre expertise et contribuer à construire enfin une vraie politique en faveur de la création, de la rémunération juste et équitable des artistes et producteurs, et dun dialogue renforcé et constructif avec les internautes dont la grande majorité est toujours prêt à payer pour écouter de la musique.
Les premiers labels signataires : 6AM / AILISSAM / ALBA CARMA / AMOR FATI / AZA ID / BANZAI LAB / BEE RDS / CLAPPING MUSIC / LA CHAUDIERE PRODUCTION / COLLECTIF CA-I / COMPOSIT MUSIC / CRASH DISQUES / CRISTAL MUSIQUE / CRYPTOHYTE / DAQUI / DIAMOND TRAXX / DA SKUD REKORDZ / FACTO RDS / ICI DAILLEURS / IOT / IRFAN [LE LABEL] / JARRING EFFECTS / HORSNORMES ! / KIUI PROD / MARABI / MARV / MEDIATONE / MILLE MILLIARDS / NEURONEXION / ODETTE PRODUCTIONS / PATCHWORK / PLATINUM RDS / PRIKOSNOVENIE / SO YOUZ / SYNCOPE / TALITRES / TER A TERRE / TROISQUATRE8 / VAÏ LA BOT / VICIOUS CIRCLE / VOLVOX MUSIC / ZONE FRANCHE ainsi que les fédérations CD1D et FEPPIA _________________ Seul le Rock'n'Roll nous sauvera ! |
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